Absence de congés payés pendant la maladie de droit commun, une confirmation du Conseil constitutionnel
Les dispositions privant ou limitant l’acquisition des congés payés durant la maladie sont conformes à la Constitution !
Voilà une décision récente rendue par le Conseil Constitutionnel qui risque de réouvrir les débats de l’absence d’acquisition des congés payés pendant une période de maladie de droit commun ou de la limitation d’un an d’acquisition pour les maladies pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle …
Faisant suite à une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil Constitutionnel dans une décision du 08 Février 2024 (Décision n° 2023-1079 QPC du 8 février 2024) rendue au visa notamment de la Constitution, du code de travail et de la loi n° 46-473 du 18 avril 1946 tendant à assimiler à un temps de travail effectif pour le calcul du congé annuel les périodes pendant lesquelles le travail est suspendu pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle a admis que:
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Le législateur peut assimiler à des périodes de travail les seules périodes d’absence du salarié pour accident ou maladie professionnelle « sans étendre le bénéfice d’une telle assimilation aux périodes d’absence pour cause de maladie non professionnelle ».
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Il lui est également « loisible » de limiter cette mesure à une durée ininterrompue d’un an.
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La Déclaration des Droits de l’Homme et le principe d’égalité ne s’opposent pas à ce que le législateur régisse de façon différente pour des raisons d’intérêt général les maladies de droit commun et celles liées à des accidents du travail ou maladies professionnelles.
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que « la méconnaissance du droit au repos doit être écarté ».
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Au regard l’objet de la loi, le législateur est bien-fondé à prévoir des règles différentes d’acquisition des droits aux congés payés pour les salariés en arrêt de maladie selon les motifs de la suspension de leur contrat de travail.
Et surtout :
Il rajoute que les dispositions qui permettent au seul salarié en maladie pour accident du travail maladie professionnelle de bénéficier de l’acquisition de congés payés « ne méconnaissent pas non plus le droit à la protection de la santé, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit » et que de ce fait, elles doivent « être déclarées conformes à la Constitution »
Cette décision contredit donc les arrêts de la Cour de Cassation du 13 septembre 2023 ( Pourvois n° 22-17.340 à 22-17.342 ; 22-17.638 ; 22-10.529, 22-11.106) ….
Extrait Décision n° 2023-1079 QPC du 8 février 2024
- En premier lieu, aux termes du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, la Nation « garantit à tous … la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs ». Le principe d’un congé annuel payé est l’une des garanties du droit au repos ainsi reconnu aux salariés.
- Selon l’article L. 3141-3 du code du travail, le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur, dans la limite de trente jours ouvrables par an.
- Les dispositions contestées de l’article L. 3141-5 du même code prévoient que sont considérées comme des périodes de travail effectif les périodes, dans la limite d’une durée ininterrompue d’un an, pendant lesquelles l’exécution du contrat de travail est suspendue pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle.
- Le Conseil constitutionnel n’a pas un pouvoir général d’appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement. Il ne saurait rechercher si les objectifs que s’est assignés le législateur auraient pu être atteints par d’autres voies, dès lors que les modalités retenues par la loi ne sont pas manifestement inappropriées à l’objectif visé.
- Il ressort des travaux préparatoires de la loi du 18 avril 1946 mentionnée ci-dessus, qui est à l’origine des dispositions contestées, que le législateur a souhaité éviter que le salarié, victime d’un accident ou d’une maladie résultant de son activité professionnelle et entraînant la suspension de son contrat de travail, ne perde de surcroît tout droit à congé payé au cours de cette période.
- Au regard de cet objectif, il était loisible au législateur d’assimiler à des périodes de travail effectif les seules périodes d’absence du salarié pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle, sans étendre le bénéfice d’une telle assimilation aux périodes d’absence pour cause de maladie non professionnelle. Il lui était également loisible de limiter cette mesure à une durée ininterrompue d’un an.
- Dès lors, le grief tiré de la méconnaissance du droit au repos doit être écarté.
- En second lieu, selon l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse ». Le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit.
- La maladie professionnelle et l’accident du travail, qui trouvent leur origine dans l’exécution même du contrat de travail, se distinguent des autres maladies ou accidents pouvant affecter le salarié.
- Ainsi, au regard de l’objet de la loi, le législateur a pu prévoir des règles différentes d’acquisition des droits à congé payé pour les salariés en arrêt maladie selon le motif de la suspension de leur contrat de travail.
- Dès lors, la différence de traitement résultant des dispositions contestées, qui est fondée sur une différence de situation, est en rapport avec l’objet de la loi.
- Le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la loi doit donc être écarté.
- Par conséquent, les dispositions contestées, qui ne méconnaissent pas non plus le droit à la protection de la santé, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution.
Pascale Rayroux